L’un des créateurs le plus secret du monde de la mode adepte du « rien ne se perd, tout se transforme ».

Né le 9 avril 1957 à Gand ce styliste unique et avant-gardiste était comme le 7ème membre du groupe des « 6 d’Anvers », qui sortait en 1979 de l’Académie Royal des Beaux-Arts d’Anvers et explosera de manière internationale (comme Ann Demeulemeester ou encore Dries van Noten). Mais c’est un reportage sur Paco Rabanne et André Courrèges qui provoquera un déclic pour Martin en 1983.

Un an plus tard, il monte à Paris pour devenir l’assistant de Jean-Paul Gaultier.

J’avais déjà compris qu’il était très bon mais je ne savais pas à quel point.

(J-P Gaultier)

La maison éponyme Maison Martin Margiela est fondée en 1988 provoquant des réactions immédiates dans le milieu et cela tout particulièrement après sa première collection « raw », grunge et déstructurée qui challenge complètement le luxe et fera sa marque de fabrique.

Dans un rejet complet du « Mass-media », Margiela essaye de rester totalement anonyme, ne se fait que très rarement photographier et ne répondra à presque aucune interview si ce n’est par fax.

Connu pour son côté décalé, c’est avec beaucoup d’étonnement que l’on apprend en 1997 que Martin Margiela est nommé directeur artistique womenswear de la maison Hermès et, lors de sa première rencontre avec Jean-Louis Dumas (président Hermès), ce dernier lui demandera s’il allait couper le mythique « Kelly » en deux car son travail était plutôt grunge et destroy à l’opposition de la maison de Haute Couture.

L’association Margiela & Hermès, plutôt surprenante aux premiers abords, reposait sur une passion commune pour l’excellence du travail artisanal.

(JL Dumas)

Continuant à faire évoluer sa propre marque, c’est de manière totalement épurée que Martin Margiela lancera sa première collection Menswear en 1998 nommée « Line 10 ». Retravaillant tout son univers, chaque catégorie de produit possède dès lors un numéro compris entre 0 et 23 faisant acte de code référence et non de chronologie. Les étiquettes originales étaient blanches et vierges marqué de 4 points de coutures blanches que l’on pourra voir apparaitre à l’extérieur du vêtement.

L’année 2002 sonne pour la Maison Margiela ses débuts comme société publique suite au rachat d’une grande partie des actions par Renzo Russo du groupe Diesel. Un an plus tard, et ce après 6 ans de travail acharné, c’est son ancien mentor et formateur Jean-Paul Gautlier qui reprendra sa place à la tête de la création Hermès.

La collection Margiela la plus acclamée par la critique fut celle présentée en mars 2006 représentant l’univers « récup. » de Martin, utilisant comme matière première du tissu d’ameublement, des ceintures de sécurité, des bottes d’orteils et des bijoux de glaces colorés teignant les vêtements à mesure qu’ils fondaient lors du défilé.

Saluant son travail et son regard critique du monde de la mode, le Musée de la Mode d’Anvers exposa en 2008 une retrospective sur le travail de la Maison Margiela « 20 ». Celle-ci se déplacera 2 ans plus tard à Londres au Somerset House et, lors du vernissage en présence de nombres de ses pairs réputés du milieu, la question du jour était « Sera-t-il présent ? ». Fidèle à lui-même il ne fit aucune apparition à cette soirée.

Les rumeurs disant qu’il existait quelques désaccords entre Martin Margiela et Renzo Russo par rapport à la tournure commercial que prenait sa marque, il quitta son poste de directeur artistique de MMM avec le sentiment que la maison sacrifiait son authenticité d’origine et qu’il avait raconté ce qu’il avait à dire.

Dans les mois suivant sa démission, le groupe Diesel ne trouvant pas de successeur pour remplacer Martin, à la tête de la maison, une nouvelle équipe anonyme travaillera en team à la création des collections contrairement à toutes ces maisons de Haute Couture qui créé leur image de marque autour du directeur artistique de son travail et de sa personnalité.

Surfant sur une nouvelle vague, MMM se lance dans la décoration d’intérieur en 2011 en redécorant des suites à « La maison Champs Elysées » et, un an plus tard, annonce leur toute première collaboration avec H&M et leur collection capsule « High Street ».

La Maison Martin Margiela, toujours aux mains du collectif, reçoit officiellement l’appellation « Haute couture » en 2012. Et aura 2 ans plus tard,  à sa direction artistique, un styliste qui aura beaucoup fait parler de lui et qui signe son grand retour, John Galliano.

On se souviendra du travail de Martin Margiela car il a imposé son propre regard de la mode, son sens conceptuel de la déconstruction, de la récupération et son avant-gardisme. Il ne parlait jamais de son oeuvre en son nom mais toujours au nom du collectif. C’est un créateur simple, qui suit ses valeurs et non les tendances et les paillettes du métier et ayant une volonté profonde d’anonymat pour lui mais aussi pour ses mannequins. Celles-ci défilaient effectivement de manière masquée afin que l’attention ne se concentre que sur le vêtement et non sur le mannequin et le côté glamour de la mode auquel Martin n’adhérait pas.

Il se fit aussi remarquer en organisant ses défilés dans des lieux insolites comme dans une station de métro, un entrepôt désaffecté de la SNCF ou encore sur un terrain vague. Martin Margiela a retourné l’histoire de la mode et après 21 ans à la tête de MMM, il a complètement disparu de ce monde à cent mille lieux de lui pour récupérer son anonymat tant chéri.

Redécouvrez le documentaire produit par Yoox qui retrace la personnalité du créateur belge Martin Margiela à travers le regard de grands noms du milieu.

S.